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Maboula Soumahoro : “Le concept de blanchité est une réalité”

Maboula Soumahoro, autrice de "Le Triangle et l'Hexagone" (Ed. La découverte) (Patricia Kahn)

Docteure en civilisations du monde anglophone et spécialiste en études africaines-américaines et de la diaspora noire/africaine, Maboula Soumahoro est aussi maîtresse de conférences à l’université de Tours et présidente de l’association Black History Month, dédiée à la célébration de l’histoire et des cultures noires. Autrice de Le Triangle et l’Hexagone – Réflexions sur une identité noire (Ed. La découverte), elle invite à interroger la notion de « privilège blanc » et à analyser les mobilisations récentes contre les violences policières et le racisme dans ce contexte de pandémie. “De nombreuses inégalités s’abattent encore davantage avec cette crise sanitaire sur les populations africaines-américaines, et les violences policières ont été en quelque sorte la goutte d’eau qui a fait déborder le vase”, souligne-t-elle.

Comment appréhendez-vous cette période de déconfinement ?

Maboula Soumahoro – Je n’ai pas de certitudes, je pense comme d’autres personnes. Pendant le confinement, on a conscience de faire partie d’un épisode sans précédent, la dimension globale de la situation, était parfois lourde à porter. Aujourd’hui, le déconfinement me paraît très désorganisé, je n’y vois pas beaucoup de sens. Que ce soit au niveau national ou international chacun se déconfine à son rythme mais difficile de savoir si cela se fait dans le respect du rythme des autres pays. A l’intérieur des frontières françaises, le découpage a l’air flou et précipité. Comme si, désormais, la seule urgence est la crise socio-économique qui nous attend : mais quelle est la place accordée aux considérations sanitaires et de santé publique ? Je ne suis pas très convaincu par ce qu’il se passe mais je fais partie des privilégiés qui peuvent bénéficier du télétravail et qui n’ont pas besoin de sortir pour aller travailler donc c’est un peu étrange…

Depuis le 25 mai dernier, aux Etats-Unis, la mort de George Floyd, un homme noir de 46 ans, aux mains de policiers blancs a catalysé la gronde contre les violences policières et la fracture raciale. Vous avez étudié et enseigné aux Etats-Unis, à l’université de Columbia, ce qui se passe actuellement aux Etats-Unis vous paraît-il, dans une certaine mesure, liée à la pandémie ?

Les Etats-Unis et beaucoup d’autres pays d’ailleurs… Les questions de racisme et de violences policières sont très complexes et sont souvent abordées de manière assez simpliste. Cette crise sanitaire internationale fait que l’on met en cause la police tout en soulevant de nombreuses autres questions. Aux Etats-Unis, il a été démontré que la communauté africaine-américaine a été la plus touchée par le Covid-19. A cause des mécanismes structurels du racisme, une communauté vulnérable sera vulnérable à plein d’autres niveaux : sociaux, économiques, politiques, culturels… Mais aussi sur le plan de la santé, ce que l’on oublie malheureusement trop souvent.

De nombreuses inégalités s’abattent encore davantage avec cette crise sanitaire sur les populations africaines-américaines, et les violences policières ont été en quelque sorte la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Tout ça fait que le besoin de faire communauté, de manifester, de se réunir a, sans doute, était encore plus urgent dans ce contexte.

En France, le préfet de Paris a interdit le rassemblement à l’appel du Comité Adama du 2 juin au motif qu’il serait trop dangereux, sanitairement parlant, de se réunir. Il s’agissait en réalité d’une excuse, d’un effort pour museler cette parole-là. C’est un argument de mauvaise foi puisqu’une semaine plus tard, la marche antiraciste du mardi 9 juin était autorisée pour des raisons presque morales. Qu’est-ce qui a changé en une semaine au niveau sanitaire ? En tout cas on voit bien comment cette situation de santé publique reste liée à la question du racisme qui se déploie à tellement de niveaux que je suis toujours étonnée des analyses simplistes.

Comparé au mouvement Black Lives Matter de 2015 ce qui frappe ici c’est le caractère multiracial de la mobilisation. Peut-on réellement parler d’un « tournant » d’après vous ?

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A propos Aboubacar

Journaliste et animateur radio. Directeur de Publication de ©Afroguinée Magazine, premier portail culturel et événementiel de Guinée-Conakry.

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