C’était une vraie école de la parole! Des bouches qui parlent et des oreilles qui écoutent. Ce vendredi à Conakry, l’acte 2 de la “Nuit du Conte” a tenu toutes ses promesses. Les conteurs Burkinabè, Sénégalais et Guinéen, ont offert au public un spectacle plein enseignement, mêlant art oratoire et musique traditionnelle.
A 18 heures TU, le soleil se couche sur l’hôtel Noom situé au cœur de la capitale guinéenne au bord de l’océan Atlantique. C’est ici que la structure Koumakan a aménagé à sa guise pour abriter sa seconde édition de la grande Nuit du Conte. De loin, vous êtes tout de suite happés par la décoration du village artificiel de l’événement installé dans le jardin dudit hôtel.
Avant d’y accéder, vous êtes soumis aux exigences sanitaires. C’est la période du Covid, tous les spectateurs étaient appelés à se désinfecter les mains et même les chaussures. Ensuite, vous êtes accueillis par des hôtesses bien vêtues de tenues traditionnelles qui offrent gratuitement à la rentrée des masques de protection anti-covid à chaque invité. Ce fut un événement à guichet fermé mais le nombre de places était limité (200 places) pour éviter une éventuelle propagation du virus.
Il était 20 heures sonnantes quand Soul Bangs et sa femme Manamba Kanté accomapagnés de plusieurs choristes et musiciens démarraient la veillée avec de belles musiques traditionnelles. Les chansons cultes de Doura BARRY, feu Momo Wandel SOUMAH et biens d’autres artistes sont magistralement interprétées par le couple Bangoura. Une belle collaboration qui a fait parcourir les frissons à coup sûr dans le jardin de Noom Hôtel.
Quelques minutes plus tard, c’est au tour de Sékouba Kandia KOUYATE d’emporter l’assistance dans un tourbillon de musique pure mandingue. “Simbo” avec sa voix bien portante a passé en revue la belle histoire de la charte de Kouroukan Fouga, sous le règne de Soundiata Keita.
Aux environs de 21 heures, Elhadj Leboune pour la première fois, fait son apparition devant un public guinéen. En tenue forêt sacrée et muni de sa guitare, le conteur sénégalais, avec ironie, dénonce la sécheresse et l’immigration clandestine. Son message était captivant !
La vedette de la soirée, le guinéen Moussa Doumbouya alias Pétit Tonton a fait monter le mercure à son paroxysme. Il a quant à lui, conter avec une “parole parlée” et une “parole chantée” à travers la parenté à plaisanterie, une pratique sociale propre à la Guinée et certains pays d’Afrique de l’Ouest.
La grande surprise de cette deuxième édition, fut l’apparition inatendue de Binta Laly Sow, une diva de la musique pastorale. Du haut de ses 78 ans et de ses 40 ans de carrière artistique, l’auteure de la célèbre chanson “Bouloundjouri” s’est laissée aller.
Malgré le poids de l’âge, la voix de Binta Laly n’a pas bougé d’un iota. Elle a tenu le public en haleine pendant une bonne dizaine de minutes en musique et en danse.
Ensuite, vient le Burkinabé KPG. Lui aussi, vêtu de Leppi, a conté de fabuleuses histoires avec dextérité. Le public est conquis ! Avec une oreille attentive, l’assistance est suspendue aux lèvres du médaillé d’argent aux 6ème jeux de la Francophonie. Du début à la fin, il a prodigué des conseils très utiles.
Gastromie au menu africain…
Ce spectacle a été aussi un tremplin pour la gastronomie guinéenne. De “Madoukoui” à la sauce “konkoé” en passant par du “fonio lafidi”, les spectateurs composés de plusieurs nationalités se sont régalés. Tous, ont apprécié les copieux repas; spécialité guinéenne. Un vrai délice!
Pour rappel, conter est une part élémentaire de la culture guinéene. Mais à cause de la mondialisation, cette tradition vire à la somnellence. Avec ce spectacle annuel, cette pratique se reveillle de plus en plus sous une nouvelle forme. Elle évolue vers une forme d’art vivant et itinerant.
Vivement la prochaine édition de la Nuit du Conte !
Mohamed KOMAH