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Joe Driscoll et Sékou Kouyaté en interview !

Joe Driscoll et Sékou Kouyaté, substance commune : Deuxième album, Monistic Theory. Avec plus de 400 concerts donnés aux quatre coins du monde au cours des cinq dernières années, Joe Driscoll et Sékou Kouyaté ont développé sur scène la complicité qu’ils avaient intuitivement ressentie lorsqu’ils avaient été réunis pour la première fois. Sur leur deuxième album baptisé Monistic Theory, le guitariste américain et le joueur de kora guinéen installé au Danemark ont convié d’autres musiciens à prendre part à leur conversation musicale. Rencontre.

RFI Musique : Le titre de votre nouvel album n’est pas de ceux qui se comprennent tout seuls. Pourquoi l’avoir intitulé Monistic Theory ?
Joe Driscoll
 : C’est vrai que ce n’est pas simple du tout. Mais je suis tombé sur cette phrase dans un livre que je lisais. En fait, c’est une théorie selon laquelle, fondamentalement, tout ce qui se trouve sur terre est constitué de la même substance. Le genre de croyance qui dit que je suis Dieu, tout comme l’arbre, la rivière, ou toi. Qu’il n’y a qu’une seule chose. Que nous venons tous de la même source. Et c’est exactement ce que je ressens. Que nous sommes tous connectés les uns aux autres. Comme ce qui se passe avec Sékou et moi. Je ne pouvais pas croire que je n’avais jamais entendu parler de cette façon de penser, et je me suis dit : pourquoi ne pas l’utiliser ? Ce que j’aime particulièrement dans la musique, c’est une forme de transcendance. Aller au-delà de nos pensées, des limites de l’humanité : on a joué en France, en Allemagne, dans de nombreux endroits où personne ne parle soussou, la langue de Sékou qui se pratique en Guinée. Mais ça n’avait pas d’importance, car les gens ressentaient l’esprit, la musique. Une communication sans mots, et je trouve que c’est un des aspects intéressants de ce projet.

Comment communiquez-vous tous les deux, avec des mots ou avec la musique ?
Maintenant, je parle un peu français. Au début, quand on était en studio pour faire le premier album, ça allait parce que le producteur avec qui on travaillait parlait français et un peu anglais. Mais lorsqu’on on était en tournée, c’était vraiment très stressant, car on n’avait personne avec nous pour traduire et du coup, je ne pouvais rien expliquer à Sékou. Après la première année, j’ai acheté le logiciel Rosetta Stone pour apprendre le français. Et depuis je parle comme un touriste étranger qui vient en France, mais du moment qu’on peut se comprendre, c’est déjà bien !

Quand avez-vous compris que votre association avec Sékou pouvait si bien fonctionner ? La première fois que vous avez joué ensemble?

Tamala

Joe Driscoll & Sekou Kouyate
Monistic Theory
(Cumbancha)
2016

En 2009, on a fait une jam-session dans un festival à Miramar, pas très loin de Marseille. J’étais déjà allé là-bas auparavant et chaque fois, après les concerts, je restais pour jammer : il y avait un percussionniste marocain, un musicien de Palestine qui jouait des claviers, ou encore Kandia, le petit frère de Sékou avec qui je m’entendais bien. Les organisateurs du festival ont été si impressionnés qu’ils ont voulu programmer Sékou et moi ensemble, l’année suivante. Et dès que nous avons commencé, instantanément, je me suis dit : ce type est incroyable, je veux jouer avec lui ! Une semaine après, je pensais déjà faire un album avec lui, déménager en France… On me disait que j’allais trop vite, que je ne le connaissais pas encore assez ! Mais parfois, quand tu sais, quand ça fait tilt, il ne faut pas hésiter.
Qu’avez-vous voulu dire ou montrer avec ce nouvel album ?
Avec le batteur et le bassiste, ça ajoute une nouvelle dimension. J’avais envie d’un son, plus raffiné, moins brut que sur Faya. Montrer davantage la musicalité. Sur le plan des paroles, je voulais souligner que notre humanité doit progresser autant que l’a fait notre technologie, que nous avons plus en commun culturellement que ce qui nous sépare. Il y a tant de peur vis-à-vis des étrangers, vis-à-vis des autres. Dire que la musique est un langage universel est un cliché, mais je voulais essayer de l’illustrer.

Sékou est-il le premier artiste africain avec lequel vous avez joué ou avez-vous une longue histoire avec les musiques d’Afrique ou des Caraïbes ?
Quand j’avais 8 ans, j’ai trouvé une cassette de Bob Marley dans le bus scolaire et je l’ai écoutée chaque jour. Ma mère écoutait aussi pas mal Paul Simon, et son album Graceland m’a interpelé : je voulais savoir qui étaient ces musiciens, à qui appartenaient ces voix. Ça m’a conduit à Ladysmith Black Mambazo et à partir de là, j’ai trouvé d’autres groupes, d’autres chanteurs… J’aime beaucoup ce qui est en rapport avec les harmonies vocales, les ensembles vocaux. Ça a toujours été un de mes rêves d’aller en Afrique, de jouer là-bas. La façon qu’on y a de voir la musique est différente de celle qu’il y a en Occident. En 2007, j’ai fait une tournée en solo en Afrique du Sud, au Malawi, au Mozambique. Je suis tombé en amour avec la culture, les rythmes, ces musiciens prêts à partager, à m’apprendre leurs rythmes. J’ai été très inspiré par cette expérience et en 2008, j’ai vécu un peu en Gambie – pas très loin de chez Sékou, en Afrique de l’Ouest. Là-bas, j’ai rencontré un joueur de kora et cet instrument m’a complètement époustouflé. En fait, j’ai toujours été attiré par les grooves et les rythmes africains. Tout comme Sékou est un grand fan de hip hop et de son occidental. Nous avons tous les deux, des horizons musicaux très larges et nous sommes chacun fascinés par la culture de l’autre. C’est pour cela que notre association fonctionne si bien.
Joe Driscoll et Sékou Kouyaté Monistic Theory (Cumbancha/Pias) 2016
Site officiel de Joe Driscoll et Sékou Kouyaté
Page Facebook de Joe Driscoll et Sékou Kouyaté

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A propos Aboubacar

Journaliste et animateur radio. Directeur de Publication de ©Afroguinée Magazine, premier portail culturel et événementiel de Guinée-Conakry.

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