[INTERVIEW] – De retour en Guinée, Abdoul Karim connu sous le nom de « M’Pandy », le lead vocal du groupe traditionnel, Les Étoiles De Boulbinet, a bien voulu nous accorder une interview. Lisez !
Slt M’Pandy ! Ça fait plaisir de te rencontrer
Merci mon frère !
Quel est l’objet de ton séjour au pays ?
Je suis en Guinée pour un temps. Ensuite, pouvoir regrouper Les Étoiles de Boulbinet. Vous nous avez trouvé même sur un travail comme ça, en pleine répétition.
Alors, c’est quoi le projet ?
Nos projets pour la culture guinéenne dépassent nos moyens financiers. Personnellement, si j’avais les moyens de mes ambitions, la culture guinéenne n’allait pas disparaître, nous avons une culture très riche. Mais en Guinée, il y’a un manque d’union entre les hommes de culture. Maintenant, tout le monde affiche son côté intérêt. Donc, si tu n’as pas les moyens pour tes projets, tu ne peux faire que le minimum.
Présentement, nous sommes entrain de nous battre. Nous avons un projet de mémorial en faveur de nos amis disparus. Il reste maintenant de voir si nous pourrons obtenir du financement.
Veux-tu nous faire comprendre que les Etoiles de Boulbinet se relèvent sur un bon pied après ses années de somnolence ?
Justement !
Mais qu’est ce qui a justifié la disparition de ton groupe sur le marché après des années de succès ?
Il y’a un adage Soussou qui dit qu’un sac vide ne se tient pas débout. Et nous savons tous que c’est la vérité. Mon groupe appartient à toute toute la Guinée. Puisqu’il met en valeur la sa vraie culture. À un moment, si nous ne sommes pas accompagnés, nous ne pourrons pas nous seuls, nous prendre en charge. Tous les membres du groupe comptent sur moi, alors que moi seul, je ne peux satisfaire tout le monde. C’est la Guinée qui doit nous venir au secours. Les moyens financiers font défaut. Alors, c’est compte tenu de toutes ces réalités, que Les Etoiles de Boulbinet se portent mal.
Avez-vous été une fois approché par quelconque autorité ou mécène du pays pour comprendre vos problèmes ?
Nous avions tout abandonné pour servir notre pays. Tout ce que nous faisions, nous le faisions pour le peuple. Les gens nous félicitent souvent mais ce n’est pas ce qui nous nourrit ? Nous avons aussi nos familles et nos besoins personnels. Pour être clair, depuis que le groupe est dispersé, aucun responsable ou homme de culture, ne nous a appelé pour tenter de nous réunir et discuter avec nous. Ou encore moins, un mécène pour nous appuyer. Mais tout le monde ne fait que dire Les Étoiles de Boulbinet ont disparu. Pititi ! Patata ! Mais qui a fait quoi pour nous aider ? Personne !
En réalité, vos albums ont connu un véritable succès.
Oui, c’est vrai. Les Étoiles de Boulbinet ont sorti cinq (5) albums notamment : « Wâa Mali » en 1997, « Garafiri » en 2000, « Contrôlez » 2004, « Cinquantenaire » et l’album « 10 Ans Chronos ». Nous avons vraiment marqué notre époque. Nous pouvons encore le faire, s’il y a un soutien.
Quels sont les souvenirs de ton groupe que tu gardes encore en mémoire ?
Y’a beaucoup de meilleurs souvenirs, mais aussi les regrets. Nous avons perdu beaucoup de nos amis comme Papa Yans. Ce choc ne nous a pas permis d’atteindre à nos objectifs. Cela a été une grande perte pour nous.
Quelles sont les opportunités que tu as eu à travers ce succès ?
Regardez ! Je vis actuellement en Allemagne. En Guinée aussi, j’ai beaucoup d’accès et toutes les portes s’ouvrent pour moi. J’ai aussi l’estime de la population et des hommes de culture. Pour moi, c’est grand !
Aujourd’hui tous les groupes traditionnels guinéens ont perdu la vitesse, nombreux se sont d’ailleurs séparés. Notamment : les Messagers de Boulbinet, Les Ambassadeurs, les Espoirs de Coronthie etc…. Selon toi, où se situe le problème ?
C’est très simple. Tu sais quand tu as des enfants, tu dois t’occuper d’eux. Si tu abandonne ton premier fils, les jeunes frères qui viendront derrière, vont souffrir.
Que veux-tu dire exactement ?
Les Étoiles de Boulbinet ont donné le meilleur d’eux pour valoriser la culture guinéenne. Le pays doit reconnaitre ça pour nous. L’Etat n’a pas su prendre soin du premier groupe traditionnel (Les Etoiles de Boulbinet). Donc, tous ceux qui sont venus derrière, ne pouvaient pas tenir longtemps. Nombreux artistes cherchent de nos jours de quoi manger. Alors, ils sont obligés de faire les éloges pour gagner un peu d’argent.
Quel a été toujours le rapport entre les Etoiles de Boulbinet et le Ministère de la Culture ?
Aucun Ministre de la Culture ne nous a appelé un jour pour un petit soutien. Il y a beaucoup de groupes qui sont dans la même situation que nous.
Quelle lecture fais-tu de la musique guinéenne ?
Avec cette nouvelle génération, la tendance et la couleur de la musique guinéenne ont changé. Ils sont intéressés par l’argent, c’est à dire le commercial. Ils se sont tous embarqués dans une pirogue qui n’est pas la notre. Tout ça, juste pour vivre.
Avant, on voyait des jeunes qui s’intéressaient à la calebasse traditionnelle. Mais actuellement, c’est le contraire car, ils ont vu que les aînés n’ont pas pu s’en sortir avec ces instruments. Donc, ils sont tout de suite tombés dans la facilité. A cette allure, comment les choses pourront avancer ?
Merci M’Pandy pour cette interview
Je vous remercie aussi
Propos recueillis par Idy BAH
Photos/Abdoul Gentleman
AFROGUINÉE MAGAZINE