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La guitare enchantée de Moh! Kouyaté

Loundo, premier album du chanteur guitariste. Devenu depuis quelques années l’une des sensations de la scène afro-parisienne, le chanteur et guitariste guinéen Moh! Kouyaté s’est enfin concentré sur sa propre carrière avec un premier album intituléLoundo, qui parvient à être à la fois cohérent et multiple, sobre et riche, accessible et recherché.

Le coup de foudre a été réciproque : quand il a mis sur sa tête le couvre-chef qu’il venait de dénicher dans un magasin « à l’ancienne » à Cologne, en Allemagne, juste avant de se produire avec la Sierra-léonaise Mariama, Moh! Kouyaté a compris que cet accessoire et lui étaient faits l’un pour l’autre. « Le soir, le chapeau a eu du succès et, depuis, je ne l’ai plus quitté », confie le musicien guinéen, aussi affable et malicieux dans la parole que dans le jeu.

Autour du cou, son talisman « antiballes », comme on dit chez lui, rappelle ce fond superstitieux qu’il ne cultive pas mais qu’il ne rejette pas non plus. « J’essaie de concilier l’Afrique traditionnelle et mon éducation dans la religion musulmane », explique-t-il. Chaque fois qu’il s’apprête à monter sur scène, dans une forme de communion, il appelle le nom de ses ancêtres disparus, en particulier celui de sa grand-mère : « Elle a eu un rôle très particulier dans ma vie. Je dormais chez elle, je mangeais avec elle, elle m’apportait beaucoup d’amour. C’est elle qui m’a acheté un ukulélé au marché, quand j’avais une douzaine d’années, et qui m’a dit qu’un jeune griot devait jouer et aussi chanter. Moi, chanter, ça ne me parlait pas au départ », raconte le trentenaire, issu d’une de ces familles où la musique se transmet de génération en génération.

Chez les Kouyaté, l’instrument multiséculaire est le balafon, avec lequel Moh! fait sa première apparition sur le sol européen en 2003, aux côtés de son compatriote Doura Barry – l’occasion de découvrir aussi que ce cousin du xylophone n’aime pas les températures froides ! Mais c’est à la guitare que le jeune homme s’illustre.

Quand il prend celle de son père et casse une des cordes, alors qu’il a quinze ans, il pense qu’il va être puni. Ce sera en réalité sa première leçon. Les suivantes arriveront par la radio, où il entend Sékou Bembeya Diabaté (du Bembeya Jazz) mais aussi BB King et George Benson.

L’autodidacte voudrait bien avoir une formation plus académique et tente sa chance à plusieurs reprises pour venir étudier en France. En vain. « Je ne regrette pas, parce que j’ai trouvé mon chemin », assure celui qui semble avoir fait des mots « passion, acharnement, travail »,son slogan.

En Guinée, il monte un groupe qui joue régulièrement dans un hôtel. Le koriste Ba Cissoko fait partie des effectifs. Il trouve aussi sur sa route le bluesman américain Correy Harris, personnage central du film Du Mali au Mississippi de Martin Scorcese, avec lequel il tourne aux États-Unis en 2006. C’est là-bas, se souvient-il, qu’il a appris la mort du Malien Ali Farka Touré, rencontré quelques mois plus tôt à Conakry.

Peu de temps après, il s’installe à Paris. Et ne tarde pas à se faire remarquer, notamment par le bassiste camerounais Hilaire Penda, pilier de la scène afro-parisienne, qui avait d’ailleurs participé en 1984 à la version originale de Yeke Yeke, tube historique du guinéen Mory Kanté. Moh! s’implique aussi dans le projet de la Malienne Fatoumata Diawara. En fils aîné ayant le sens du devoir, il a appris à se servir en dernier, après s’être occupé de son frère Petit Kandia et sa sœur Adama Kouyaté, dont il a réalisé les albums, avant de faire enfin le sien.

Sur Loundo, pourtant, figurent des chansons comme Limanaya, une de ses premières compositions pour laquelle il était entré en studio vers 1995, à l’Alliance franco-guinéenne, et qui aura donc attendu encore près de vingt ans. Son expérience en tant que sideman aurait pu se transformer en piège, celui dans lequel sont tombés tant de musiciens surdoués lorsqu’ils se lancent sous leur nom. Il a su l’éviter.

Sur un album, tu n’as pas le temps de montrer tout ce que tu sais faire », reconnait-il, lucide. Les concerts sont là pour compléter les premières impressions. Et confirmer non seulement son talent, mais aussi sa faculté à évoluer entre plusieurs mondes qu’il réunit sans les forcer.

Moh! Kouyaté Loundo (Foli Son / L’Autre Distribution) 2015
Site officiel de Moh! Kouyaté
Page Facebook de Moh! Kouyaté

En concert au Café de la Danse à Paris, le 5 mars 2015.

 

 

A propos Aboubacar

Journaliste et animateur radio. Directeur de Publication de ©Afroguinée Magazine, premier portail culturel et événementiel de Guinée-Conakry.

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