« Nous vivons du soutien de nos familles vu que la plus part d’entre nous ne travaille pas »
La musique authentique guinéenne vit actuellement ses pires moments malgré qu’elle fut jadis la gloire de la culture africaine à travers des artistes pétris de talents et épris de succès. Bien que certains acteurs de cette musique tentent tant bien que mal de vivre de cet art, nombreux sont aussi ceux qui croupissent aujourd’hui au boulevard de la misère. Ils sont nombreux ces grands noms de la culture guinéenne qui tirent présentement le diable par la queue ou qui meurent dans des conditions misérables à cause de la marginalisation de ce secteur dans les politiques de développement du pays. Le Super Kolima Jazz de Labé en est une belle illustration de cet état de fait. Après avoir égaillé le Foutah et la Guinée toute entière lors de la première république, cet orchestre n’a actuellement qu’une seule guitare pour un ensemble de 9 musiciens. Pauvre d’instruments de musique et de moyens financiers, ce groupe essai de survivre malgré les difficultés quotidiennes.
Pour comprendre cette réalité, notre reporter est allé à Labé à la rencontre de Thierno Mamoudou Diallo Gilmar, Alpha Midjaou Baldé, et Monsieur Kodjo tous musiciens de cet orchestre. Dans un entretien qu’ils ont bien voulu nous accordé, ils évoquent les conditions de vie du Super Kolima Jazz.
V.J : Revenons d’abord brièvement sur l’histoire du Super Kolima Jazz.
Gilmar : Le Kolima est un grand orchestre puisse qu’il a participé à tous les festivals qui se passaient à Conakry et à travers le pays. Nous avons été au trentenaire qui s’est tenu au temps de la 2èmerépublique. Chaque samedi, on jouait au palais de la Kolima de 20h à 4h du matin. Sur le plan international, nous avons participé à des festivals de la sous région comme la semaine de l’amitié et de la fraternité, en Gambie, au Sénégal, au Mali, en Côte d’Ivoire et en Mauritanie. Des personnes comme : Docteur Macka, Djibril Labhiko, Docteur Labhiko, Condé Lansana, El Hadj Amadou Dieng AGP, Pascal Condé ont été chanteur dans cet orchestre. Depuis que la nouvelle génération que nous sommes a pris les commandes, on a mis un seul album sur le marché du disque et c’est ce n’est autre que l’opus ‘’Sarsan Ouré Kaba’’ sortit en 1988. Vers les années 81, le Kolima a été 3ème au Festival National et on s’est aussi bien classé dans pas mal de compétitions et de grands rendez-vous culturels d’ici et d’ailleurs. Le groupe compte actuellement 9 musiciens.
V.J : Comment se porte aujourd’hui cet Orchestre?
Gilmar : Le super Kolima Jazz se porte très mal car on n’a pas d’instruments de musiques. Pour tout le groupe, il n’y a qu’une seule guitare qui appartient à notre ami Alpha Midjaou. On n’est donc obligé de répéter avec ce qu’on a pour se remémorer c’est tout, car nous sommes nostalgiques de ces heureux moments ou le Kolima brillait de mille feux. Ce manque d’instruments me déchire vraiment le cœur parce que si on avait cela à notre disposition, on pouvait rassembler beaucoup de jeunes autour de la musique et cela allait diminuer le taux de chômage et de délinquance. Néanmoins nous sommes là, on existe et on a tout le temps prouvé qu’on peut bien jouer. Notre dernière grande prestation date de la récente fête de l’indépendance à la résidence du préfet.
V.J : Avez-vous eu à entreprendre des démarches dans le but de trouver du soutien ?
Gilmar : Bien sûr que oui. On a été voir le gouverneur qui nous a promit qu’il fera tout pour qu’on ait des instruments, ce qui jusque là n’a pas encore été fait. On a été voir le préfet qui nous a aussi demandé de faire un devis pour un orchestre complet, ce qu’on a aussitôt fait bien sûr mais jusqu’à présent rien.
V.J : A part la musique, que faites vous pour vivre ?
Gilmar : On se démerde, on marche pour vivre. Des fois, on se concerte pour pouvoir participer à des festivités histoire de montrer qu’on existe toujours. A vrai dire nous sommes soutenu par la famille car la plus part d’entre nous ne travaille pas. D’autres par contre se démerdent avec un petit commerce ou autres petites activités.
V.J : Si on vous demandait qu’elle a été votre plus beau souvenir durant votre carrière d’artiste, qu’allez vous répondre ?
Gilmar : Le plus beau souvenir reste la sortie de notre album ‘’Sarsan Ouré Kaba’’ en 1988, lorsqu’on est revenu d’Abidjan. Je prends vraiment du plaisir à me souvenir de ce moment que je n’oublierais jamais. Le simple fait de me souvenir de ce moment me remonte le moral.
V.J : Un appel à lancer ?
Alpha Midjaou Baldé : Je lance un appel aux autorités locales, nationales et aux personnes de bonnes volontés à bien vouloir sauver le Kolima puisse que la jeunesse même est nostalgique des prestations en live de ce groupe. Je demande au gouvernement d’envoyer des instruments pour la jeunesse de Labé.
Monsieur Kodjo : Etant enseignant et promoteur d’écoles, j’ai instauré la musique en 7ème année dans mon école parce que j’ai trouvé que la jeunesse s’intéresse beaucoup à la musique. En faisant cela, je me suis rendu compte que les enfants de 9, 10 et 11 ans captent mieux la tablature, le solfège que les adultes et ils s’y intéressent beaucoup. A Labé, on voit la jeunesse un peu partout mobilisé dans l’éphorie de la joie autour de la musique. Donc il y’a lieu de faire face à cette jeunesse parce que nous sommes là comme des initiateurs. Connaissant que nous sommes déjà fatigué et que nous devons bientôt disparaitre, il faut qu’on transmette la connaissance à la jeunesse et cela ne peut se faire sans instruments de musique. Quand les cerveaux comme le Kolima sans instruments disparaissent, c’est la jeunesse et la Guinée qui perd. Nous lançons donc un appel à tous les niveaux dans ce sens.
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